en Français
Les Centuries du mage Nostradamus,
un chemin vers le trésor des Templiers ?
1ère partie
« Que ceux qui lisent ces vers y réfléchissent longuement
Que le vulgaire profane et ignorant ne s’en approche
Que tous les astrologues les sots, les barbares s’en écartent
Qui passe outre, qu’il soit maudit selon le rite . »
( quatrain VI, 100)
Une enfance au pied du château des rois mages
Le mage Nostradamus est né un jeudi 14 décembre 1503 aux environs de douze heures et trente minutes, dans la maison de son bisaïeul Jean de Saint-Rémy, rue des Barri à Saint-Rémy-de-Provence. Son père Jacques de Nostredame et son épouse Renée de Saint-Rémy décidèrent de prénommer leur premier-né Michel. Ainsi Michel de Nostredame portera sur son nom les deux protagonistes qui doivent sauver l’humanité à la fin des temps, à savoir l’archange Saint-Michel et Notre-Dame.
Le jeune Michel de Nostredame a grandi dans cette cité provençale située au pied des Alpilles, dominée par l’antique château des seigneurs de Baux de Provence. Le château des Baux est à une petite dizaine de kilomètres de Saint-Rémy. Les seigneurs des Baux de Provence prétendaient descendre du roi mage Balthazar et avaient pour blason l’étoile à seize rais en l’honneur des trois rois.
Quant à Michel de Nostredame, alias Nostradamus, il se glorifiera du fait que sa famille était issue de la tribu d’Issachar, l’un des douze fils de Jacob, tribu dont il est dit que ses membres avaient le don de prophétie. Suivant la tradition familiale, le jeune Michel fera profession de médecin et d’astrologue, situation qui avait permis à ses ancêtres du côté maternel de servir de très grands princes comme René d’Anjou (1409-1480), roi titulaire de Jérusalem et de Sicile, duc d’Anjou et comte de Provence.
Ce sont les comtes de Provence de la maison d’Anjou qui vont s’accaparer le château des Baux suite au décès en 1426 de la dernière héritière provençale de cette maison, Alix de Baux.
Dans l’inventaire du château réalisé juste après la mort d’Alix de Baux, il est précisé que l’on retrouva dans sa chambre deux romans de chevalerie de la Table Ronde : un Lancelot et un Tristan. Dans la chapelle privée du château était suspendu au mur une antique tapisserie de haute lisse représentant l’histoire des trois rois mages1.
En 1554, René d’Anjou, dit le bon Roi René, avait décidé suite à son second mariage avec la jeune Jeanne de Laval d’offrir la baronnie des Baux à sa toute nouvelle épouse ce qui fut fait le 1er février 1459. Jeanne de Laval semble avoir particulièrement apprécié ses séjours dans le château des rois mages.
On peut croire que Jeanne sut faire revivre la grandeur passée, époque où le château des Baux tenait une des plus illustres cour d’amour de Provence, où les plus grands troubadours d’Europe venaient divertir la table de ces grands seigneurs. Parmi ceux-ci, un chevalier-poète nommé Wolfram von Eschenbach. Ce poète bavarois est surtout connu pour son roman de chevalerie de la Table ronde Parzival. Mais il est aussi l’auteur d’un autre roman : Willehalm, qui conte les aventures du héros légendaire Guillaume d’Orange. Dans ce roman, le héros porte sur son écu le blason des seigneurs des Baux de Provence – ce qui rappelle que c’est Guillaume de Baux, prince d’Orange (1176-1218) , qui souhaitait associer son image à celle de ce héros légendaire.
Dans son célèbre roman Parzival (1200-1203)2, Wolfram von Eschenbach nous révèle plusieurs choses très intéressantes. La première est que la matière de son roman lui vient de Provence. La deuxième est que les héritiers du roi Arthur et des chevaliers de la Table Ronde sont les princes d’Anjou. Il se trouve que le bon roi René d’Anjou était le digne hériter de cette lignée.
En troisième lieu, Wolfram von Eschenbach nous dit que ce sont les Templiers qui sont les gardiens du Graal. En Provence, à l’époque du bon roi René les Templiers n’existent plus. Ce sont les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, chevaliers de Rhodes, qui les ont remplacés. Mais alors, dans ce cas, qui avait la charge du saint Graal ? Pour les poètes et troubadours de l’époque, ce ne pouvait être que ce nouveau chevalier qui s’appelait Galaad. Galaad était l'élu de Dieu, le chevalier prédestiné pour accomplir la quête du saint Graal.
Après avoir été fait chevalier de la Table Ronde et après avoir juré fidélité à la quête, Galaad se voit récompensé en recevant l’écu blanc à croix vermeille. Dans le roman, cet écu était considéré comme une relique appartenant à Joseph d’Arimathie qui recueillit le sang du Christ dans la coupe du saint Graal. La croix vermeille sur l’écu était faite du propre sang de Joseph d’Arimathie. On sait que la croix vermeille des Templiers rappelait de la même façon le sang versé par les martyrs à l’image du sang versé par le Christ crucifié, ce qui conforte l’idée que c’est bien l’écu des défunts Templiers, gardiens du Graal, qui est remis à Galaad.
Pourtant, par la bulle pontificale Ad providam Christi vicarii, fulminée le 2 mai 1312, la sainte Église catholique interdisait à quiconque d’entrer dans l’ordre des Templiers, d’en revêtir l’habit, de se comporter en Templier, sous peine d’excommunication ipso facto encourue.
Les poètes n’ignoraient pas que si les Templiers avaient voué leur religion à Notre-Dame, ils avaient aussi pour saint patron le chevalier Saint-Georges, gardien de la Cité sainte de Jérusalem, auquel ils avaient emprunté l’habit.
Le roman de la Table Ronde qui nous raconte cette histoire et que nous utilisons ( BNF Manuscrits Français 343) a été réalisé par un certain Albertolus de Porcelis vers les années 1380 pour le seigneur de Milan Barnabé Visconti (1325-1385). Les Visconti ont comme mausolée la basilique Saint Eustorge à Milan et c’est bien le chevalier Saint Georges qui veille sur leur repos.
La basilique Saint Eustorge a accueilli pendant plusieurs siècles de l’an 344 jusqu’en 1164 les reliques des rois mages provenant de Constantinople ce qui créé une singulière filiation dans ce roman avec le roi Baudemagus, c’est-à-dire Baux le roi mage, qui accueille Lancelot et Gauvain dans son château et qui connaît très bien l’écu à croix vermeille destinée au chevalier Galaad puisqu’il a tenté de l’utiliser pour son propre compte, ce qui lui fut des plus préjudiciable.
La confrérie des chevaliers de la Table Ronde ne serait pas au complet sans son Merlin l’Enchanteur. Il se trouvait qu’au pied du château, dans la cité de Saint-Rémy, le sieur Jean de Saint-Rémy, le bisaïeul de Nostradamus faisait profession de médecin et qu’il était aussi astrologue. Autant dire que ses talents devaient être particulièrement appréciés au château des rois mages. Jean de Saint-Rémy entra au service du roi René d’Anjou comme médecin ordinaire. À la mort du roi en 1480, le château fut quelque peu délaissé. La reine Jeanne préféra retourner sur ses terres du Maine-et-Loire où elle s’éteindra en 1498. Le château des rois mages devint une belle endormie.
On octroya à Jean de Saint-Rémy la charge de clavaire, c’est-à-dire de trésorier de la cour royale de Saint-Rémy, fonction qu’il occupa de 1481 jusqu’à sa mort supposée en 1504 – ce qui fait que Michel de Nostredame n’aurait eu qu’à peine un an à la disparition de son illustre ancêtre.
C’est probablement Jean de Saint-Rémy qui permit à Jacques de Nostredame, le père de Michel, d’accéder à la charge de notaire. Ayant perdu son fils trop jeune, le vieux Jean de Saint-Rémy offrit à sa petite-fille Renée une dot confortable. Cette situation assura à Michel une éducation sans entrave. C’est aussi à Michel que la famille décida de confier les instruments de divination de son illustre bisaïeul. La route de Michel de Nostredame semblait toute tracée. Elle commençait sous les meilleurs hospices et sous la bonne étoile des rois mages.
Les Centuries, un écrit templier ?
C’est à l’âge de la maturité que Nostradamus publiera ses fameuses prophéties qui le rendirent célèbre3. Ces prophéties furent nommées les Centuries car le livre était composé de dix « centuries », chacune de ces centuries étant formée de cent quatrains4.
On s’intéressera aussi aux écrits de son frère cadet Jean de Nostredame. Les deux frères, bien qu’ayant une certaine différence d’âge, écrivirent leurs œuvres principales à peu près à la même époque et s’encouragèrent mutuellement dans leurs recherches.
En 1552, Nostradamus dédicace le second livre des Fardements et des confitures à son frère Jean de Nostredame. Quand à Jean de Nostredame, dans sa dédicace à Catherine de Médicis pour son ouvrage Les Vies des plus célèbres et anciens poètes provençaux (1575)5, il déclare que c’est son défunt frère Michel qui l’aurait encouragé à poursuivre son oeuvre. Jean est aussi l’auteur d’une Histoire de la Provence qui parle de toute cette chevalerie des temps anciens comme les seigneurs des Baux de Provence. Il parle aussi des Templiers et des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, qui deviennent chevaliers de Rhodes puis de Malte. Si Michel de Nostredame a eu le souci de cacher les choses, Jean a plutôt cherché à dévoiler ce qui était oublié. On peut dire que si Michel est un livre fermé, à sa manière, Jean serait le livre ouvert. Jean ne terminera jamais son histoire de Provence qui fut interrompue par sa mort en 1578. C’est son neveu, César de Nostredame, fils de Michel, à qui la famille confiera le soin de parachever l’oeuvre des Nostredame. Après un remaniement de l’oeuvre, le fils de Nostradamus publiera en 1614 L’Histoire et chroniques de Provence de César de Nostredame6.
Il semblerait que ce soit M. P.V. PIOBB, amateur d’ésotérisme et d’occultisme, qui, dans les années 1930, fut le premier à suggérer l’idée que les Centuries de Nostradamus seraient en réalité un écrit templier7. Selon P.V. PIOBB, les Centuries dateraient d’après la dissolution officielle de l’ordre et seraient relatives moins à des prophéties qu’à des directives données par-delà le temps à des individus futurs.
En 1958, G. BELTIKHINE dans un article intitulé « Le secret des prophéties dites de Nostradamus, leur origine templière » aux éditions Cahiers Inconnues8, poursuit l'idée en présentant le quatrain V, 14 qui selon lui remonte au XIVe siècle et concerne Juan Fernandez de Heredia (Heredde), 32e grand-maître des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, un ordre héritier des biens Templiers.
« et Mars en Leo Espagne captive
Par chef lybique au conflit attrapé
Proche de Malte, Heredde prise vive
et Romain sceptre sera par coq frappé. » (V,14)
Ce quatrain relaterait, selon l’auteur, la mésaventure du grand-maître des Hospitaliers qui fut fait prisonnier en 1378 près de la cité de Corinthe au moment même où à Rome Urbain VI accédait au trône pontifical, ce qui provoqua un nouveau schisme et l’élection d’un antipape, Clément VII, qui retourna à Avignon « et Romain sceptre sera par coq frappé. ».
En 1967, Louis CHARPENTIER, dans son ouvrage Les Mystères Templiers9, reprend le sujet. Cet auteur y précise que les indications concernant cet écrit templier pourraient s’attacher au trésor de l’ordre qui n’a jamais été retrouvé. À l’appui de cette opinion, il cite une série de quatrains dont le célèbre :
« Dessous de chaine Guien du Ciel frappé,
Non loing de là est caché le tresor,
Qui par long siecles avoir esté grappé,
Trouvé mourra, l’oeil crevé de ressor . » (I, 27)
La difficulté de cette thèse est que les Centuries de Nostradamus ont été publiées plus de deux siècles après la fin de l’ordre des Templiers.
En 1971, Pierre GUERIN dans son ouvrage dédié à son père et à René Guénon, intitulé Le véritable secret de Nostradamus, l’ange de Dieu, s’intéresse lui aussi aux rapports qui ont pu exister entre les Centuries de Nostradamus et l’ordre des Templiers. À la suite de P.V. Piobb et de G. Beltikhine, Pierre Guérin tend à voir dans les Centuries de Nostradamus un écrit templier. Cependant, il peine à trouver des éléments concrets qui pourraient appuyer cette thèse. Guérin cite les conclusions des travaux de Jean Tourniac, qui s’est intéressé aux liens entre la franc-maçonnerie et les Templiers pour qui il y eut « une préservation probable du noyau ésotérique templier indispensable pour la transmission d’une chaîne ininterrompue. »10
En 1998, M. Run FUTTHARK, dans son ouvrage Les Templiers, moines et chevaliers de la lumière, revient sur cette thèse. Pour expliquer l’écart qui existe entre la fin du Temple et la publication des Centuries, l’auteur imagine l’existence d’une société secrète, née des ruines du Temple, qui, agissant dans l’ombre, aurait initiée le jeune astrologue Michel de Nostredame à leurs mystères. Run Futthark parle d’un « collège d’initiés, gens éveillés instruits et sages, pourquoi pas détenteurs de la conscience templière .»11
Pour finir, dans l’ouvrage L’Oeuvre du vieux moine, tome I, le Dernier chemin des Templiers édité en 201012, l’auteur Rudy CAMBIER, qui prétend ne pas s’intéresser à l’ésotérisme templier, et après une longue étude des quatrains de Nostradamus, finit par se persuader qu’effectivement les Centuries se rapportent à un écrit templier dont l’objectif principal serait de donner des indications pour dévoiler le chemin qui mène au trésor des Templiers.
Rudy Cambier prétend aussi que les rimes des quatrains relèveraient d’un style franco-picard du XIVe siècle et ne pourraient pas être l’œuvre d’un Provençal du XVIesiècle. Pour expliquer ce style franco-picard, Rudy Cambier imagine qu’un Templier flamand aurait pris et caché le trésor avant l’arrestation des Templiers et qu’une fois l’ordre dissous et ses dignitaires condamnés, il aurait confié son secret aux Supérieurs du monastère cistercien de Cambron dans lequel il se serait réfugié. Le dit Supérieur (le vieux moine) en aurait tiré un poème en franco-picard que Nostredame, de passage dans ce monastère, se serait accaparé.
Cette thèse s’appuie sur l’hypothèse que Nostradamus aurait visité l’abbaye cistercienne d’Orval dans le diocèse de Trèves, qui serait sur le chemin de l’abbaye de Cambron, mais à l’heure d’aujourd’hui trop peu d’éléments viennent corroborer cette thèse pour qu’on puisse l’accréditer. Par contre, nous savons qu’avant l’arrestation des Templiers, le grand-maître de l’ordre, Jacques de Molay, avait confié la garde du trésor au nouveau Visiteur cismarin, Gérard de Villiers, qui s’était enfui du Temple de Paris avec quarante frères et cinquante chevaux. Gérard de Villiers semble effectivement originaire des régions du Nord. Selon la Prosopographie des Templiers, il fut en début de carrière Précepteur de Hainaut, de 1251 à 1273. Il pourrait donc bien s’exprimer en franco-picard.
S’il faut chercher l’oeuvre d’un vieux moine, pourquoi pas celui qui a rédigé à Saint-Omer ou à Tournai l’Estoire del Saint Graal, la queste del Saint Graal, Morte Artu (British Library, Royal 14E III)
et que l’on voit représenté au feuillet (F6v) :
Ce roman qui date des années 1300-1325 a été rédigé à l’époque du procès et de l’abolition de l’ordre des Templiers (1307-1314). L’ouvrage contient 116 miniatures. Quatre d’entre elles nous permettent de reconstruire une histoire. Le feuillet F24v nous montre un Templier tenant par la bride la cheval d’un roi. On n’imagine pas que cette image de Templier soit là par hasard.
Le feuillet F85v nous montre Joseph d’Arimathie habillé en évêque qui trace de son sang la croix vermeille sur l’écu blanc. L’écu de l’évêque peut être comparé avec celui du Templier pour constater qu’ils sont identiques. Cet acte très symbolique de la part de l’évêque d’Arimathie pourrait laisser penser qu’après la destruction de l’ordre des Templiers, le clergé a peut-être cherché à contourner les conséquences d’un procès imposé par le roi de France pour sauver la chevalerie du saint Graal.
Le feuillet (f94v) est la fameuse scène où le chevalier blanc a vaincu le roi Baudemagus qui portait l’écu à croix vermeille. Le chevalier blanc ordonne à l’écuyer de Baudemagus de remettre l’écu à Galaad.
Le dernier feuillet de notre série (f138v) montre Galaad emportant le trésor du Graal avec la Table d’argent portée par plusieurs personnages.
Galaad est le symbole de cette nouvelle chevalerie célestielle qui va cacher son précieux dépôt dans la cité mythique de Sarras. Cette cité est dans le royaume du Prêtre Jean, qui est aussi la cité des rois mages. Jean de Hildesheim, dans son Histoire des trois rois (1372), nous dit que le Prêtre Jean est appelé ainsi pour cause de Saint-Jean l’Évangéliste, le mieux aimé de Dieu et pour cause de Saint-Jean Baptiste, qui a baptisé Jésus-Christ13.
L’épisode de la cité de Sarras est ce qu’on appelle un « cycle d’occultation ». Le Graal quitte le monde pour retrouver le palais spirituel. On peut tirer deux conclusions différentes de cette fin du cycle arthurien. La première est que la fin de l’ordre des Templiers signifiait la destruction à tout jamais de la quête du Graal et de sa spiritualité. L’autre conclusion est que Galaad cache le Graal parce que la chevalerie célestielle qu’il représente va dorénavant exister en secret dans cette cité de Sarras, qui est l’expression de la spiritualité johannique.
Personnellement, je pense qu’il est intéressant d’explorer la seconde conclusion : la destruction de l’ordre du Temple n’a pas forcément signifié la fin définitive de cette chevalerie. Je ne parle pas ici de l’ordre du Christ, créé au Portugal par la bulle Ad ea ex quibusdu 14 mars 1319 où beaucoup de Templiers ont pu se réfugier et constituer une forme de survivance spirituelle. Ce qui nous intéresse au regard de Nostradamus, c’est le fait que cette spiritualité templière ait pu survivre en Provence. Si tel fut le cas, cela ne pouvait être qu’au sein d’un autre ordre, celui des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, devenus chevaliers de Rhodes. Pour Jean de Nostredame, la Provence était considérée comme une terre de prédilection pour cet ordre. Il insiste sur le fait que le premier grand-maître élu chez les Hospitaliers était un Provençal14. Il est vrai que le prieuré de Saint-Gilles en Provence était un des plus puissants dans l’organisation de cette chevalerie de Terre Sainte. Pour Jean de Nostredame, les Hospitaliers étaient chez eux en Provence. Reste à savoir si parmi ces chevaliers Hospitaliers, certains furent reçus secrètement dans cette mystérieuse chevalerie du Graal issue de l’ordre des Templiers.
Les Centuries, un livre d’histoire
La première chose que les études contemporaines sur les quatrains de Michel Nostradamus, censées prophétiser l’avenir de la date du 14 mars 1557 jusqu’en 3797, nous révèlent est que les quatrains donnent plutôt l’impression de faire référence à des événements ayant eu lieu bien avant la date de 1557. Certains auteurs, comme P.V. Piobb, ont fini par se demander si Nostradamus était bien l’auteur des Centuries. En réalité, pour P.V. Piobb la réponse est catégorique : « Nostradamus n’a pas écrit un mot de ces prophéties .». « Nostradamus était totalement incapable de savoir de quoi il s’agissait dans le livre qui porte sa signature. »15
Ce jugement définitif semble quelque peu excessif et doit être mis sur le compte de la déconvenue de cet auteur qui dans un premier temps avait traité l’ouvrage des Centuries au premier degré. Pour nuancer ce propos, aujourd’hui on s’accorde à penser que Nostradamus a cherché à projeter dans le futur des prophéties préexistantes ou des récits historiques sans qu’il en fut toujours le véritable auteur.
Pour certains quatrains, Nostradamus se serait donc contenté de les « rabouter obscurément », c’est-à-dire de mélanger les vers pour les rendre obscurs – une méthode de divination liée à une technique littéraire. Celui qui nous révèle la méthode divinatoire de notre « grand augure » Nostradamus, c’est son secrétaire et biographe Jean Aimé de Chavigny, qui connut personnellement Michel de Nostredame. Dans son ouvrage publié en 159416, il parle du maître Nostradamus comme d’un « Janus français ». Pour monsieur Chavigny , Janus a été un très grand roi de l’Italie que l’on représente avec deux visages « pour avoir été très prudent et très sage gouverneur de son peuple prévoyant les choses à venir et se souvenant du passé. »
En bon théologien qu’il est, Chavigny cite un commentaire sur les Psaumes de David qui dit : « que c’est le propre des vaticinations : recevoir les choses futures, non seulement, mais aussi narrer les présents avec les passés ». Passé, présent, futur. Tout cela est lié. Cela ne fait plus deux faces mais trois, ce que nos amis Templiers ne désavoueraient pas.
Les quatrains de Maître Nostradamus, par leur style énigmatique, les initiés diraient « sibyllins », pourraient avoir deux – voire trois - lectures possibles : celle qui s’attache au passé, celle du présent et celle concernant le futur.
À l’appui de cette lecture, Chavigny cite le quatrain suivant :
« Après grand trouble humain plus grand s’appreste
Le grand moteur les siecles renouvelle :
Pluye, sang, laict, famine, fer et peste,
Au ciel veu feu, courant longue estincelle. » (II, 46)
Ce quatrain de Nostradamus incite à adopter une perspective cyclique où chaque événement contemporain peut se comparer à un autre événement analogue du passé ou du futur. Ce qui fait qu’à leur manière les prophéties de Nostradamus peuvent être considérées comme une sorte de livre d’histoire. Seulement, les quatrains se rapportent parfois à des événements si précis qu’il reste très difficile d’identifier ce à quoi ils se rapportent en réalité. C’est tout le paradoxe de notre démarche. Ce qui nous intéresse dans les prophéties de Nostradamus, ce n’est pas ce qu’elles nous révèlent de l’avenir mais ce qu’elles nous disent de notre passé.
Pour le peu qu’on puisse en juger, Nostradamus semble quand même assez bien documenté. À son époque, la France va être marquée par un désastre retentissant : la défaite subie à Pavie par le roi de France François Ier le 24 février 1525. Dorénavant au mains de son pire ennemi Charles Quint, le roi de France doit vivre en captivité en Espagne. Cette défaite ressemble à celle de Hattin en 1187 subie par les Latins du royaume de Jérusalem et aura les mêmes conséquences, c’est-à-dire la nécessité de trouver une alliance avec le monde musulman. À l’époque de Hattin, ce sont les Templiers qui ont dû servir intermédiaires. Cette fois-ci, c’est à l’ordre des Hospitaliers que l’on va demander de se compromettre.
Ce sera Jean de la Forest, chevalier de Saint-Jean-de-Jérusalem17, qui sera chargé de constituer une alliance franco-ottomane offensive et défensive contre les Habsbourg et leurs alliés. Cette alliance sera signée avec Soliman le Magnifique en 1536. Nostradamus note dans un de ses quatrains :
« Prince Lybinique puissant en Occident,
François d’Arabe viendra tant enflammer,
Sçavant aux lettres fera condescendent,
La langue Arabe en François translater. » (III,27)
Nostradamus nous rappelle que lors de l’ambassade de Jean de la Forest, François Ier avait aussi envoyé Guillaume Postel (1510-1581), célèbre humaniste français et grand amateur des rois mages18, qui fut chargé de rechercher des manuscrits orientaux pour le roi, qui les fit traduire en français.
Il faut croire que cette alliance avec la « Sublime Porte » avait quelque avantage car le fils de François Ier, Henri II, va poursuivre cette entente qui ne manquera pas de mettre l’ordre des Hospitaliers, devenus chevaliers de Malte, dans un certain embarras.
« La barbe crespe et noire, par engin,
Subjuguera la gent cruelle et fiere :
Le grand Chiren ostera du longin
Tous les captifs par Seline banniere. » ( II, 79)
Ce qui se traduit par :
« Ceux qui ont la barbe naturellement frisée,
Vaincront les fiers et cruels,
Le grand Henri qui est loin,délivrera
Ceux qui ont été pris par la bannière au Croissant. »
L’explication de ce quatrain est que la cité de Tripoli fut prise le 15 août 1551 par l’amiral ottoman Sinan Pacha alors qu’elle était défendue par les chevaliers hospitaliers dirigés par le maréchal de l’ordre Gaspard de Vallier. Ce chevalier français ne semble pas avoir opposé beaucoup de résistance, surtout qu’à côté de Sinan Pacha se trouvait l’ambassadeur du roi de France Gabriel de Luetz d’Aramont, qui obtint facilement la libération de tous les chevaliers de Malte faits prisonniers, dont beaucoup étaient des chevaliers français.
De retour à Malte, le grand-maître aragonais Juan de Homedes (1536-1553), favorable à l’empereur Charles Quint et plutôt méfiant vis-à-vis des Français, voulut faire condamner à mort son maréchal pour trahison. Il n’obtint que la perte de l’habit et sa mise au cachot dans lequel le maréchal condamné resta trois ans avant d’être libéré par le nouveau grand-maître Claude de la Sengle (1553-1557), un chevalier français.
Nostradamus a tellement bien intégré cette nouvelle entente entre le roi de France et l'empire ottoman que dans plusieurs quatrains (VI,27 et VIII,54) , il appelle le roi Henri II le « Grand Henri Selin » ou « Seline », mot arabe qui signifie « sain » ou « pur ». L’alliance franco-ottomane initiée par François 1er va perdurer pendant au moins trois siècles19.
Un trésor caché ?
Dans un passage d’une lettre adressée à son fils César, Nostradamus nous fait une révélation concernant ses sources en disant : « Combien que plusieurs volumes qui ont été cachés par longs siècles me sont été manifestés ». Nostradamus avoue lui-même qu’il a reçu des écrits qui avaient été cachés depuis plusieurs siècles.
Cette révélation faite par Nostradamus à son fils César ouvre la voie à toutes les spéculations, surtout elle permet aux tenants de la thèse templière d’éliminer leur principal obstacle : ces fameux deux siècles qui séparent la dissolution de l’ordre du Temple de la publication des Centuries. En effet, si Nostradamus a eu connaissances de volumes cachés depuis de longs siècles, pourquoi pas parmi ceux-ci un écrit templier ?
Le mot « Temple » est souvent utilisé dans les quatrains mais sans pour autant que l’on ne puisse jamais formellement l’associer à l’ordre des Templiers. Un autre mot apparaît aussi souvent dans les Centuries, c’est le mot « trésor ». À toutes les époques, on a cherché à retrouver des trésors. Et pour se faire, on s’adressait parfois à des devins et des visionnaires. En tant qu’astrologue, Michel de Nostredame a été confronté à ce genre de sollicitations. En mettant le mot « trésor », le mage savait qu’il exciterait la curiosité de ses contemporains. Il joue peut-être sur la fascination que provoque ce mot dans l’imaginaire des lecteurs pour faire de l’audience.
On ne peut tout de même pas écarter l’hypothèse que Nostradamus cherche à brouiller les cartes en créant de fausses pistes comme dans une sorte de labyrinthe où le malheureux profane perdrait son bon sens à la poursuite de trésors chimériques.
Il est évident que pour Nostradamus, tous les trésors ne se valent pas. Dans une consultation de Nostredame retrouvée par le savant et antiquaire Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, Nostradamus parle de l’Oppidum de Constantine où « seront assurés les rectruyseurs trouver lesdicts os de cappito triumvirat. Ceux du passé y ont cherché trésor et treuvé mabre et plomb métalique soubz l’argile blanche ». Nostradamus laisse entendre que l’on avait été chercher fortune au fond de l’abîme de l’oppidum et que les fouilleurs n’avaient trouvé que marbre et plomb métallique sous l’argile blanche. Or dans le quatrain V, 7, il semble se moquer de l’obstination de tous ces chercheurs d’or, qui remuaient Ciel et Terre à la recherche de mythiques trésors.
« Du Triumvir seront trouvez les os,
Cherchant profond thresor aenigmatique,
Ceux d’alentour ne seront en repos,
Ce concaver marbre et plomb metallique. » (V, 7)
Par contre, quand il s’adresse au pape Paul IV, (1555-1559), à qui il dédie un de ses manuscrits, le ton n’est plus le même :
« Plusieurs choses occultes et secrètes, en la concavité de la terre toute proche des fleuves comme non guère éloignée, seront manifestées par inondations et autres secrètes perscrutations. Et, pour quelques grands secrets des lois et autres divines institutions ont été occultés longuement et livrés sous la concavité de la terre et autres seront par le soleil et la lune, manifestés ouverts ; trouvés ce que tant de temps avoit été caché, au grand contentement de la religion chrétienne. » 20
Si on part de l’hypothèse que Nostradamus n’est pas totalement un escroc, contrairement à ce que prétendait son ancien maître Jules César Scaliger, on peut faire valoir que Michel de Nostredame s’inscrit dans une tradition littéraire qui est d’ailleurs souvent liée aux projets de croisade des Occidentaux.
Dans La Noble Histoire des Lusignan publiée en 1393, l’auteur, Jean d’Arras, nous parle déjà de trésor. « Et toi, Palestine, tu seras enfermée dans la montagne du Canigou avec le trésor de ton père, jusqu’au jour où un chevalier de votre lignage y viendra, qui obtiendra le trésor, l’utilisera pour conquérir la Terre Promise et te délivreras. » L’ouvrage était dédié au duc de Berry, oncle du roi Charles VI. Quelques années plus tard, en 1401, dans Le roman de Mélusine, dédié à Jean Larchevêque, sire de Parthenay, l’auteur Coudrette reprendra l’idée du trésor caché de Palestine dans le Mont Canigou. Coudrette y consacra un long passage à la fin de son ouvrage, ce qui lui vaudra un certain succès.
De plus, il n’y a pas que les Templiers qui ont caché leur trésor dans l’attente de la réalisation de la Jérusalem Céleste. Dans les romans de la Table Ronde, le chevalier Galaad fait de même.
« Temple », « trésor », pour l’instant nous n’avons que des associations d’idées qui ne prouvent rien sur la relation entre les Centuries et une connaissance sur le trésor caché des Templiers même si ces deux mots peuvent se retrouver dans le même quatrain.
« Mis tresor temple citadins Hesperiques,
Dans iceluy retiré en secret lieu :
Le temps ouvri le liens fameliques,
Reprend, ravis, proye horible au milieu. » (X, 81)
Un autre élément a interpellé les auteurs qui défendent la thèse d’un écrit templier : c’est le nom même de Nostradamus, ou Nostredame. Pour certains, ce nom évoque l’ancienne religion des Templiers. Rappelons que l’ordre du Temple a été établi « en l’honneur de Notre-Dame », car comme le précise leur règle : « nostre Dame fu comencement de nostre religion et en li e a onor de li sera, si Dieu plaist, la fin de nostre religion, quand Dieu plaira que ce soit. » 21
P.V. Piobb se demandait si Nostredame était bien le vrai nom de Nostradamus et non un nom d’emprunt. En réalité, c’est le grand-père de Nostradamus, Guy de Gassonet, juif converti au christianisme, qui prit le nom de Nostredame. On dit que c’est le cardinal archevêque d’Arles, Pierre de Foix, qui lui imposa ce nom vers les années 1455. Cette information, si elle se confirme, alerte tout de même sur la démarche de cette conversion car la cathédrale Saint-Trophime d’Arles, siège de l’archevêché, a longtemps été la succursale d’une société secrète : la confrérie des Rois Mages, qui a joué un rôle occulte important au sein de l’ordre des Templiers.
La confrérie des Rois Mages
Quand on pénètre dans la cathédrale Saint-Trophime d’Arles, on entre dans la cour des grands et de ceux qui pendant des siècles ont régi le destin de l’Occident en toute discrétion. La confrérie des Rois Mages a été créée en 1164 par Renaud von Dassel, archevêque de Cologne.
On pense qu’à l’origine, cette confrérie était au service des archevêques princes électeurs et avait pour vocation d’assurer le couronnement des empereurs germaniques dans les trois royaumes qui constituaient le Saint Empire romain germanique, c’est-à-dire l’Allemagne, l’Italie et le royaume de Bourgogne. Le siège de la confrérie se situait dans la cathédrale de Cologne où étaient conservées les reliques des rois mages. La cathédrale d’Aix-la-Chapelle, lieu de couronnement du roi des Romains, dépendait directement de l’archidiocèse de Cologne.
Pour le royaume d’Italie, c’est dans la cité de Milan que les empereurs devaient se faire couronner. Pour le dernier royaume, celui de Bourgogne, qui comprend la Provence, c’est précisément dans la cathédrale Saint-Trophime d’Arles que les couronnements avaient lieu. Il est vrai que la confrérie en Provence ne fut guère sollicitée puisque seulement deux couronnements ont eu lieu dans la cathédrale Saint-Trophime d’Arles : celui de l’empereur Fréderic Barberousse en 1178 et celui de l’empereur Charles IV de Luxembourg en 1365.
La confrérie des Rois Mages nous rappelle que la Provence fut longtemps une terre du Saint-Empire germanique. Hélas, les traces documentaires de l’existence de cette confrérie sont assez maigres puisqu’elles consistent en un parchemin sous forme de cartulaire provenant des archives de la cathédrale de Cologne. Il ne reste de ce cartulaire qu’un simple feuillet orné d’une miniature encadrée de huit textes à droite et au-dessous, datés à partir de l’année 1250 jusqu’aux années 1300. Tous les autres feuillets du cartulaire ont disparu.
La date de 1250 paraît bien tardive par rapport à l’initiative de Renaud van Dassel, archevêque de Cologne, qui transféra les reliques des Rois Mages de la cité de Milan dans sa cathédrale à Cologne en 1164. Il est à peu près certain que la confrérie fut active sous le règne de l’empereur germanique Frédéric Barberousse et qu’elle fut à l’œuvre en Provence lors de son sacre dans la cathédrale Saint-Trophime d’Arles en 1178. Parmi les membres de cette confrérie qui ont assuré le couronnement de l’empereur Fréderic Barberousse dans la cathédrale Saint-Trophime d’Arles, on compte les seigneurs des Baux de Provence qui, nous nous en souvenons, prétendaient descendre du roi mage Balthazar.
Les relations de la confrérie des Rois Mages avec l’ordre des Templiers
Ce qui nous intéresse plus particulièrement, ce sont les liens qui ont unis la confrérie des Rois Mages avec l’ordre des Templiers. On pense que c’est Richard Cœur de Lion, héros de la troisième croisade, et qui cherchait à imposer son neveu Otton de Brunswick sur le trône du Saint-Empire germanique, qui favorisa le rapprochement de l’ordre des Templiers avec cette confrérie qui prétendait avoir le pouvoir d’influer sur l’élection des empereurs germaniques.
Pour souder l’alliance entre la confrérie des Rois Mages et l’ordre des Templiers, le nouvel empereur germanique, Othon IV de Brunswick céda à la confrérie sa couronne ainsi que les objets liturgiques utilisés lors de son sacre en 1198 à Aix-la-Chapelle. Cette couronne et ces objets liturgiques, que l’on voit représentés sur la châsse des Rois Mages à Cologne portés par des anges qui entourent le Christ du Jugement Dernier, furent déposés par la confrérie des Rois Mages dans le trésor des Templiers.
À part le feuillet retrouvé dans les archives de la cathédrale de Cologne, nous nous appuyons sur trois autres documents pour retracer l’action de la confrérie des Rois Mages sur l’ordre des Templiers. Le premier et le plus important reste l’histoire des rois mages de Jean de Hildesheim datée des années 1372. On peut considérer que l’Histoire des Trois rois est un ouvrage de référence dans la bibliothèque de la confrérie.
Des choses très importantes nous sont révélées dans cet ouvrage, comme le fait que la confrérie avait chargé en 1200 les seigneurs des Baux de Provence de transférer à Saint-Jean d’Acre un diadème orné de pierres précieuses d’une inestimable valeur ainsi que plusieurs joyaux pour qu’ils soient déposés dans le trésor des Templiers.
L’Histoire des Trois Rois nous dit aussi que les seigneurs des Baux avaient fait construire un palais à Saint-Jean d’Acre où ils ont fait traduire en français des livres sur les rois mages ; c’est-à-dire que la confrérie s’était installée près du siège de l’ordre des Templiers à Saint-Jean d’Acre, certainement pour y faire du lobbying sur les orientations politiques que pouvaient prendre le grand-maître et son gouvernement ou pour influer sur les décisions du chapitre général. Ce lobbying s’est fait par l’intermédiaire de Templiers qui représentaient les intérêts de la confrérie au sein même de l’ordre comme avec le Templier Raymond de Baux, seigneur de Meyrargues, enterré en 1236 dans la commanderie templière de Bayle en Provence.22
Le deuxième document qui nous intéresse est l’Histoire et Chroniques de Provence de Jean de Nostredame, remanié par son neveu César, qui nous apprend que Raymond de Baux, seigneur de Meyrargues, était le frère d’armes d’un autre Templier : Roncelin de Fos. Tous deux s’étaient opposés au comte de Provence dans la cité de Marseille.23
C’est là qu’intervient un troisième document qui sont les Statuts secrets de l’ordre des Templiers signés par un certain Roncelin de Fos en 1240.
Portrait imaginé de Roncelin de Fos, XXIe siècle,
avec le vrai sceau du maitre de Provence
Si l’on croise ces deux documents, cela nous fait comprendre que la confrérie des Rois Mages ne s’est pas contentée de faire du lobbying auprès de l’ordre des Templiers. Elle a aussi organisé en son sein un réseau parallèle, un « cercle intérieur » d’initiés, les chevaliers du Graal. Comme les rois mages, ils se sont attachés à une étoile mais chez les frère élus du Temple cette étoile était un pentalpha.
À ce propos, il faut signaler un roman anglais des chevaliers de la Table Ronde daté des années 1375-1400 particulièrement significatif. Il s’agit du roman Sir Gauvain et le chevalier vert (British Library, Cotton Nero A.x) Dans ce roman unique en son genre, Gauvain arbore sur son écu un pentalpha nommé « pentangle ». Le pentangle de Gauvain était d’or sur fond rouge.
Dans ce récit, il est décrit comme un signe de fidélité et comme un nœud sans fin impossible à rompre. Les cinq points du pentangle représentent cinq valeurs : la générosité, la courtoisie, la chasteté, la chevalerie et la piété.
Le roman nous livre aussi la force symbolique du pentangle. « Ces cinq pures vertus étaient solidement ancrées dans ce chevalier plus fermement que dans aucun autre. Et cinq fois était si liées à lui que chacune était liée à l’autre sans fin, et attachées en cinq points. Elle ne pouvait pas non plus lâcher car elle n’était jointe en aucun point, interrompue nulle part et on ne pouvait y trouver aucune extrémité à aucun angle lorsque les jeux commencèrent ou avaient tendance à se terminer. »
Ce n’est pas tout. Au vers 625 du roman, le poète fait référence à propos du pentangle au sceau magique du roi Salomon, marqué d’un pentacle qu’il reçut de l’archange Michel. Ce sceau donnait à Salomon un pouvoir sur les démons. On croirait entendre le mage Gervais de Tilbury, alias Kyot le Provençal.
Un autre détail nous frappe : la couleur rouge. Cette couleur rappelle le rituel funéraire des frères élus Templiers qui disaient la messe du Saint-Esprit en vêtement rouge. Ce rituel était calqué sur celui des moines de Cluny. Chez les Clunisiens, le cercueil du défunt était recouvert d’un drap pourpre dans lequel, après la cérémonie, les moines taillaient des chapes et des chasubles. Les moines de Cluny revêtaient ces chapes pourpres pour accompagner le défunt lors des funérailles.24 Les Clunisiens créaient ainsi un lien indéfectible entre les vivants et les morts qu’aucune frontière ne pouvait briser, qu’elle soit d’espace, de temps ou de mort : un nœud sans fin où la mort était vaincue.
Ce roman anglais de la fin du XIVe siècle avec ce frère élu sorti d’outre-tombe25 nous rappelle que dans cette chevalerie du Graal les liens entre les frères étaient si forts qu'ils pouvaient vaincre la mort du Temple.
L’héritage spirituel issu de la fusion des ordres
Avant de s’impliquer chez les Templiers, les seigneurs des Baux, que l’on soupçonne d’être à la tête de la Confrérie des Rois Mage en Provence, étaient surtout proches de l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem et c’est souvent dans leurs églises qu’ils choisissaient leur dernière demeure comme donat de l’ordre. Dès 1164, un membre du lignage, Guilhem II de Baux, apparaît comme frère de l'Hopital dans la maison de trinquetaille. En 1177, Raimond III de Baux élit sépulture dans la maison des Hospitaliers de Montpellier.26 En 1192, c’est Hugues V de Baux qui entre dans la confraternité des Hospitaliers sous le porche de l’église Saint-Thomas de Trinquetaille.27 Quand l’ordre des Templiers fut aboli, les membres de cette famille n’eurent aucun mal à intégrer l’ordre des Hospitaliers, bien au contraire.
D’une manière assez perfide, Jean de Nostredame, dans son histoire de Provence, fait remarquer que les cendres des infortunés Templiers brûlés à Paris et Senlis n’avaient pas encore refroidi que Bertrand de Baux, prince d’Orange, fit convention avec le roi Robert d’Anjou pour recevoir la portion de la principauté d’Orange possédée par les Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem.28 Cet accord, négocié pendant le procès des Templiers, surviendra après une soumission de la maison des Baux au roi Robert au moment où est actée la fin des Templiers. Cet accord venait surtout satisfaire une exigence réclamée depuis plusieurs décennies par les seigneurs des Baux puisque la cité d’Orange était divisée en deux entre leurs possessions et celles des Hospitaliers.
La chute des Templiers avait donc été profitable à une maison qui pourtant jouait un rôle non négligeable au sein de l’ordre. À partir de cette période, c’est une association à trois qui se dessine entre la confrérie des Rois Mages en Provence, les Hospitaliers et la papauté au moment où le Saint-Siège vient s'installer à Avignon en Provence (1309-1378). Cette situation était d’ailleurs préparée de longue date, dès 1274.
Depuis 1274, l’ordre des Hospitaliers gérait le comtat venaissin, terre du Saint-Siège où se situe Avignon. Le recteur du comtat était le chevalier de l’Hôpital Guillaume de Villaret. Il résidait en la capitale du comtat à Pernes (les-Fontaines). Parmi les conseillers du recteur, il y avait les seigneurs des Baux de Provence qui avaient la possession d’un palais à Pernes (les-Fontaines) comme celui qu’ils avaient à Saint-Jean d’Acre. Le lobbying de la confrérie des Rois Mages s’est fait sur les Templiers à Saint-Jean d’Acre mais aussi, à partir de 1274, sur l’ordre des Hospitaliers à Pernes (les-Fontaines).
Comtat venaissin en Provence
C’est lors du concile de Lyon en 1274 que devait se réaliser la fusion de l’ordre des Templiers avec celui des Hospitaliers suivant la volonté du pape Grégoire X (1272-1276). On remarque que Grégoire X s'appellait Teobaldo Visconti. Les Visconti furent longtemps les seigneurs de Milan, dont certains reposent dans la basilique Saint-Eustorge, ancienne demeure des rois mages. Il semble que ce soit l’opposition farouche du roi Jacques d’Aragon qui empêcha que tout se passe comme prévu, Jacques d’Aragon craignant par-dessus tout une telle fusion qui aurait remis en cause sa propre souveraineté sur le royaume d’Aragon.
Parmi les œuvres dont on peut penser qu’elles s’inscrivaient dans cette volonté de la papauté de réaliser la fusion des deux ordres de chevalerie de Terre Sainte, il nous faut signaler le roman allemand der Jüngerer Titurel (Le Nouveau Titurel) daté des années 1270-1272, attribué à Albrecht von Scharfenberg. Albrecht, que l’on présente comme le continuateur de Wolfram von Eschenbach, donne la vision d’une chevalerie du Graal qui transfère le Saint Graal dans le royaume du prêtre Jean, prêtre Jean que l’on associe à Saint Jean l’Évangéliste et aussi à Saint Jean Baptiste, patron de l’ordre des Hospitaliers.
Après la chute du port de saint-Jean d'Acre le 28 mai 1291, le pape Nicolas IV, par la bulle "Dura nimis", fulminée le 18 août 1291, va réclamer que les archevêques, avec leurs suffrageants réunis en synode provincial, tiennent conseil sur l'union des Templiers et des Hospitaliers. La plupart des synodes se prononceront en 1292 en faveur de l'union, comme celui d'Arles qui déclarait vouloir "que les Templiers et les Hospitaliers soient, comme il est demandé, réduits et unis en un seul ordre".29
C’est le pape Clément V (1305-1314), celui qui va installer la papauté en Provence, qui va imposer la question de la fusion des ordres en demandant aux deux grands-maîtres des mémoires sur ce sujet. Si le grand maître Jacques de Molay y était totalement opposé, pour les seigneurs des Baux et la confrérie des Rois Mages c’était une affaire qui avait déjà duré depuis trop longtemps.
Le palais des seigneurs des Baux à Pernes (les-Fontaines), à travers la tour Ferrande30, nous permet d’envisager l’activité de la confrérie des Rois Mages en Provence. Le sommet de la tour servait probablement d’observatoire astronomique et une salle des étages inférieurs pouvait servir de laboratoire d’études en tous genres. Quant à la salle principale, elle était décorée de fresques rappelant les exploits de la maison des Baux pendant la campagne d’Italie (1265-1268) qui offrira le royaume de Naples à la maison d’Anjou, descendante du roi Arthur et des chevaliers de la Table Ronde. Les fresques de la tour Ferrande datent des années 1323-1331.31
Au moment de l’abolition du Temple, les Baux sont intégrés à la hiérarchie hospitalière. Jean de Nostredame nous signale qu’en 1312 Barral II de Baux est nommé commandeur de Rhodes pour la commanderie hospitalière de Gap sous le magistère de Foulques de Villaret, grand-maître des hospitaliers de 1305 à 1319. Foulques de Villaret était le neveu de Guillaume de Villaret, l’ancien recteur du comtat venaissin et ami des seigneurs des Baux, qui avait été nommé grand-maître des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem de 1296 jusqu’à son décès en 1305.
C’est ainsi qu’à partir de la fin du XIVe siècle, des témoignages troublants commencent à nous parvenir comme celui d’un mystique rhénan, Rulman Merswin (1307-1382), qui prétend « l’ordre de Saint Jean a recueilli l’héritage spirituel, mystique et occulte de l’ordre du Temple. » 32
Au XVe siècle, c’est l’alchimiste Bernard de Trévise (1406-1490) qui, travaillant à Rhodes, alors siège de l’ordre des Hospitaliers, attestait avoir trouvé chez les chevaliers hospitaliers ce qu’il est convenu d’appeler la tradition secrète des chevaliers du Temple.33
Quant à Jean de Nostredame, dans son histoire de Provence, dans le passage « Commandeurs et chevaliers tant de Saint Jean que Templiers », il nous fait une curieuse affirmation en prétendant qu’un certain nombre de commandeurs hospitaliers comme le commandeur de Puymoisson, le commandeur de Manosque, le frère Jean de Venteyrol commandeur des Homergues, ainsi que d’autres commandeurs du pays, étaient encore appelés « Templiers». 34 Jean de Venteyrol ou Venterol a été commandeur des Omergues en 1390 puis grand commandeur de l’ordre avec Trinquetaille, Manosque et Aix de 1422 à 1432.
Ce que l’on commence à comprendre c’est que des dispositions avaient été prises dans lesquelles la fusion des ordres prévoyait probablement qu'un réseau de chevaliers, " la chevalerie du Graal " créé au sein de l’ordre des Templiers, avec l'appui de la confrérie des Rois Mages, puisse survivre au sein de la nouvelle institution sortie du concile de Lyon en 1274 mais, les circonstances en ayant décidé autrement, cette "fusion" ne s'opéra qu'à partir des années 1312.
On observe qu'à partir du XVe siècle, la maison des Médicis, qui dans sa cité de Florence parraine la confrérie des Rois Mages, suivra une politique identique à celle des seigneurs des Baux en Provence.
Jules de Médicis, futur pape Clément VII, a été reçu dans l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, devenu de Rhodes, alors qu’il était encore adolescent. Il devient chapelain conventuel de l’ordre des Hospitaliers et fut bientôt pourvu du prieuré de Capoue. Quand l’ordre des Hospitaliers perdit l’île de Rhodes en 1523 face aux armées ottomanes, c’est Jules de Médicis, devenu le pape Clément VII, qui négocia avec l’empereur germanique Charles Quint la cession aux Hospitaliers de l’île de Malte et de la cité de Tripoli en 1530 . L’île de Malte devint alors le nouveau siège de l’ordre.
La confrérie des Rois Mages, à travers la maison des Médicis, influa autant sur la destinée de l’ordre des Hospitaliers qu’elle l’avait fait en son temps sur l’ordre des Templiers à travers la maison des Baux. C’est peut-être cette nécessité pour l’Église romaine de disposer d’un puissant réseau d’influence au niveau européen pour diriger la politique de défense de la Chrétienté en Méditerranée qui pourrait expliquer qu’une tradition templière ait pu perdurer au sein de l’ordre des Hospitaliers.
À suivre 2ème partie
Jean-Pierre SCHMIT
NOTES:
1. Inventaire du château des Baux en 1426, publié d'après le texte original par M. le docteur L. BARTHÉLEMY; Paris, Imprimerie Nationale; 1878 (372).; extrait de la Revue des Sociétés savantes: 6e série; tome VI; 1877
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=c3wzOPZd7icC&hl=fr&pg=PA3#v=onepage&q&f=false
2. Wolfram von ESCHENBACH. Parzival (Perceval le Gallois); Tome I et II; Introduction et notes de Ernest TONNELAT. Aubier Montaigne, Paris; 1977.
3. La première édition des Prophéties de Michel de nostradamus date du 4 mai 1555, Lyon, éditeur Macé Bonhomme, avec une dédicace à son fils César datée du 1er mars 1555 mais cette édition ne comporte pas la totalité des quatrains.
4. Il faut attendre les éditions de Paris 1557 ou Lyon 1558 pour que soit publiée une version augmentée des Centuries avec la mention "centuries VIII, IX, X qui n'ont encore jamais esté imprimées". L'édition de 1558, aujourd'hui disparue, aurait comportée une dédicace au roi de France Henri II datée du 27 juin 1558.
5. Jean de Nostredame. Les Vies des plus célèbres et anciens poètes provensaux, qui ont floury du temps des comtes de Provence, par lesquelles est montrée l'ancienneté de plusieurs nobles maisons tans de Provence, Languedoc, France que d'Italie & d'ailleurs; à Lyon; Basile Bouquet pour Alexandre Marsilii; 1575
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=6KBih8EV_XAC&hl=fr&pg=PA1#v=onepage&q&f=false
6. César de NOSTREDAME. L'Histoire et chronique de Provence de Caesar de Nostradamus, gentilhomme provençal; Lyon, Simon Rigaud, 1614
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=uErLFTZ_ThEC&hl=fr&pg=PP15#v=onepage&q&f=false
7. P.V. PIOBB. Le secret de Nostradamus et de ses célèbres prophéties du XVIe siècle. Les éditions Adyar, Paris, 1927 ; P.V. PIOBB. Le sort de l'Europe d'après la célèbre prophétie des papes de Saint Malachie accompagnée de la prophéite d'Orval et des toutes dernières indications de Nostradamus. Éditions Dangles, Paris, 1939
8. G. BELTIKHINE. "Le secret des porphéties dites de Nostradamus, leur origine templière"; Cahier trimestriel Inconues; n°12; Lausanne; Pierre Genillard éditeur; 1958.
9. Louis CHARPENTIER. Les Mystères templiers. Robert Laffont, Paris. 1972 (1967). Le quatrain I,27 est cité page 241 de l'édition de 1972.
10. Pierre GUÉRIN. Le véritable secret de Nostradamus, l'ange de Dieu. Payot, Paris, 1971. p. 161. Jean Tourniac faisait référence aux "fils de la vallée", à l'origine selon lui, de la Stricte Observance, qui auraient constitué les Supérieurs Invisibles de l'ordre du Temple.
11. Run FUTTARK. Les Templiers, moines et chevaliers de la lumière. Éditions de Vecchi, Paris, 1998; p. 117. Pour Run Futthark, il semblerait que ce collège d’initiés soit les Rose-Croix.
12. Rudy CAMBIER. L'oeuvre du Vieux Moine; Tome 1 "Le dernier chemin des Templiers"; éditions Louise Courteau; Québec; 2010
13. Marianne ÉLISSAGARAY. La Légende des rois mages. Éditions du Seuil; Paris; 1965; p. 139
14. César de NOSTREDAME. L'Histoire et chronique de Provence de Caesar de Nostradamus, gentilhomme provençal; op. cit.; p. 111-112
https://books.google.fr/books?id=uErLFTZ_ThEC&hl=fr&pg=RA1-PA111#v=onepage&q&f=false
15. P.V. PIOBB. Le sort de l'Europe d'après la célèbre prophétie des papes de Saint Malachie, accompagnée de la Prophétie d'Orval et des toutes dernières indications de Nostradamus; Édition Dangles; Paris; 1939; p. 210
16. Jean Aimé de CHAVIGNY BEAUNOIS. La première face de Janus François. Lyon; 1594.
17. André CLOT. Soliman le Magnifique. Fayard, Paris; 1983; p. 183
18. Dans les oeuvres de Guillaume Postel, la thématique des rois mages est souvent abordée de manière favorable, ce qui rendra cet auteur suspect aux yeux de la Sorbonne. Il faut savoir que si la littérature sur les Rois mages initiée à la "Prisca theologia", cette antique sagesse qui comprenait l’astrologie ou la magie et qui remontrait à Hermès Trismégiste, était tolérée dans les anciens territoires du Saint Empire Romain Germanique comme l’Allemagne, l’Italie voire la Provence, dans le royaume de France, qui a obtenu l’abolition de l’ordre des Templiers et l’éradication des Cathares, toute cette littérature sur l’astrologie ou la magie était strictement interdite sous peine de se voir condamné comme hérétique par la Sainte Inquisition. C’est donc sous le manteau que cette littérature circulait dans le royaume de France Il est probable que Guillaume Postel ait eu connaissance de livres secrets sur le sujet comme celui du français et humaniste Jacques Lefèvre d’Étaples (1450-1536) qui vers les années 1490 écrivit: "La Magie Naturelle", ouvrage jamais publié et pour cause: cet écrit était fortement inspiré des oeuvres des membres de la confrérie des Rois Mages de Florence, comme Marseille Ficin, (1433-1499) ou Jean Pic de la Mirandole (1463-1494). Évidemment, avec l’accession au trône de Catherine de Médicis comme reine de France, des opportunités s’ouvraient pour les humanistes à la cour du roi de France. Mais, globalement, la noblesse française restait hostile à ces "prisci vates" , à ces "prêtres mages", soi-disant initiés aux sciences occultes. elle se méfiait aussi de cette noblesse provençale qu’elle jugeait "enjuivée" et trop complaisante avec cet humanisme dévoyé. Au final, les ouvrages de Guillaume Postel seront condamnées par l’inquisition à Venise en 1555, mais lui-même ne sera pas condamné comme hérétique mais simplement jugé comme un fou. De même Nostradamus, qui aura l’occasion d’être inquiété par l’Inquisition, sera le premier à se méfier des humeurs de la cour du roi de France pour ne pas trop la fréquenter et l’avenir lui donnera raison.
19. André CLOT. Soliman le Magnifique. Op. cit; p. 410-412
20. cité par Guy BÉATRICE. Des mages alchimistes à Nostradamus, les Mystères de la France et le Secret des temps. Éditions de la Maisnie; 1982; p. 248
21. cité par Albert OLLIVIER. Les Templiers; Éditions du Seuil; 1958; p. 62
22. Marianne ÉLISSAGARAY. La Légende des rois mages. Op. cit. ; p. 102 Concernant les seigneurs de Baux, dans l'Historia Trium Regum de Jean de Hildesheim, il est précisé " Et tous les nobles de Vaulx portent jusques a present en leurs armes le signe de l'estoille, ainsy qu'elle s'aparut as rois. Et est la coutume en parties d'Orient, en la guerre des Xristiens contre les Sarazins, le premier estandart est la croix et le second l'estoille, en la reverence des trois Rois."
23.César de NOSTREDAME. L'Histoire et chronique de Provence de Caesar de Nostradamus, gentilhomme provençal. Op. cit.; p. 196
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=uErLFTZ_ThEC&hl=fr&pg=RA1-PA196#v=onepage&q&f=false
24. Chantal FRAÏSSE. Moissac, histoire d'une abbaye. Mille ans de vie bénédictine; La Louve éditions; 2006; p. 109
25. À noter que dans le cycle arthurien, le chevalier Gauvain est, avec Lancelot, reçu au château du roi Baudemagus mais que de tous les chevaliers de la Table Ronde, seuls Perceval et Bohort ont eu la consolation d'être admis à suivre Galaad dans la cité de Sarras.
26. Florian MAZEL. La noblesse et l'Église en Provence, fin Xe - début XIVe siècle. l'example des familles d'Agoult-Simiane, de Baux et de Marseille; Éditions du CTHS; 2002; pp. 354-355.
27. L. BARTHELEMY. Inventaire chronologique et analytique des chartes de la maison de Baux; Marseille; 1882; n°92 août 1192; p. 24
28. César de NOSTREDAME. L'Histoire et chronique de Provence de Caesar de Nostradamus, gentilhomme provençal. Op. cit.; p. 330
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=uErLFTZ_ThEC&hl=fr&pg=RA1-PA330#v=onepage&q&f=false
29. Georges MINOIS. Philippe le Bel; éditions Perrin, 2014
30. Pierre BOREL, Pierre GABERT, François VACHET. Pernes dans ses murs. Éditions A. Barthélemy; Avignon; 2000. p. 47 à 53 30 a
31.Térence Le Deschault de Monredon. La tour Ferrande à Pernes-les-Fontaines (Vaucluse): Nouvelle lecture du programme iconographique; société française d'archéologie; Tome173-4; année 2015.
32. Bertran de LA FARGE. Raimon VI, le comte excommunié; Éditions Loubatières; 1998; p. 23 L'auteur cite comme référence Henry CORBIN, En Islam iranien; Éditions Gallimard; 1972
33. Henry CORBIN, En Islam iranien, Aspects spirituels et philosophiques; tome IV L'École d'Ispahan, l'École Shaykhie, le Douzième Imâm; Éditions Gallimard; 1972; p. 394
34. César de NOSTREDAME. L'Histoire et chronique de Provence de Caesar de Nostradamus, gentilhomme provençal. Op. cit.; p. 502-503
Disponible en ligne: https://books.google.fr/books?id=uErLFTZ_ThEC&hl=fr&pg=RA1-PA502#v=onepage&q&f=false